• Victor Remizov, aimez-vous parler de vos livres ?

    Pour fêter le dixième anniversaire de mon blog, créé en septembre 2011, j’ai demandé à des écrivains que j’ai rencontrés ou dont j’ai parlé au cours de ces dix années de répondre à une question : « Aimez-vous parler de vos livres ? » Les textes qu’ils m’ont fait l’amitié de m’adresser paraîtront, à raison d’un par semaine, dans l’ordre où ils me sont parvenus.

     

    En 2017, j’avais été enthousiasmé par Volia Volnaïa, magnifique roman des grands espaces sibériens en même temps que portrait très sombre de la Russie contemporaine (Belfond, traduction Luba Jurgenson, voir ici). Aussi avais-je saisi l’occasion qui m’était donnée de rencontrer l’auteur, de passage à Paris, et de lui demander un entretien. Cet homme qui se place sous le patronage de Tolstoï y disait sa volonté de parler de la vie dans son pays aujourd’hui, « une source de grand chagrin », qu’il opposait à la « source de joie pure » représentée pour lui par la nature sauvage ; il évoquait aussi son usage subtil des points de vue narratifs.

     

    En 2019, Belfond publiait le deuxième roman de Victor Remizov, Devouchki (traduction Jean-Baptiste Godon, voir ici). Il mettait en scène deux jeunes filles venues, là encore, de leur lointaine Sibérie, et découvrant la violence et la corruption régnant dans la capitale. L’une d’elles, Katia, était une de ces âmes pures comme seuls osent et savent en créer les grands auteurs de l’ancienne et de la nouvelle Russie.

     

    Depuis, Victor Remizov a publié, en 2020, un troisième roman, qui vient de recevoir, à Moscou, le prix d’État du Livre de l’année. Son titre : Вечная мерзлота, ce qui signifie : Permafrost. On aimerait tant pouvoir le lire en français…

     

    En attendant, notre auteur a accepté de répondre à ma question. Son texte a été aimablement traduit par Tatiana Riccio, qui avait déjà été l’interprète de notre entretien.

     

     

    ©Victor Remizov

     

     

    Aimez-vous parler de vos livres ?

    Oui et non. C’est, bien sûr, toujours très intéressant avec un interlocuteur intelligent, qui voit dans le livre plus de choses que je n’en vois moi-même, et des choses différentes. Ce que je n’aime pas, ce sont les débats publics qui suivent inévitablement la sortie du livre. Les questions sont presque toujours les mêmes, et je suis contraint de répéter les mêmes choses. Il y a aussi des questions que l’on pose toujours, mais auxquelles je ne suis jamais prêt. Par exemple : « Pourquoi avez-vous choisi ce titre pour votre roman ? » D’habitude, c’est la question de ceux qui ne l’ont pas lu. On peut beaucoup parler des titres, mais ça n’a pas beaucoup de sens. Par exemple, si vous avez devant vous un livre dont vous ne savez rien et qui a pour titre Guerre et paix, a priori ça ne vous dit pas grand-chose. Tandis qu’après la lecture vous vous rendez compte que c’est un bon titre. Très bon, même. Mon dernier roman s’intitule Gel éternel (Permafrost, voir plus haut, P. A.). Il y est question des dernières années de l’époque stalinienne (1949-1953) sur l’énorme chantier d’un chemin de fer long de 1 500 kilomètres, au-delà du cercle polaire. C’est la saga de plusieurs familles, en 850 pages. Pour ceux qui ne l’ont pas lu, le titre n’évoque pas grand-chose. Pour ceux qui l’ont lu, le titre est très bien choisi.

     

    Cher Pierre, je voudrais vous remercier pour votre travail, si indispensable pour nous. Pour vos articles à propos de mes livres parus en France, pour vos questions intéressantes au cours de nos interviews. Je souhaite à votre blog un nombre d’abonnés de plus en plus grand, et à vous- même une bonne santé et beaucoup de force pour continuer toujours de la même façon. J’espère bien parler avec vous encore plusieurs fois en buvant un bon café parisien. Et sans masques !

     

    Victor Remizov (traduction Tatiana Riccio)

     


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