• Voyages immobiles

    En cette période de rentrée, deux charmants petits livres nous incitent aux départs, réels ou non.

     

     

    www.mesopinions.comSur les rails, Anne Reverseau (Les Impressions Nouvelles)

     

    Cette enseignante et chercheuse à l’université de Louvain rassemble des poèmes et des extraits de romans consacrés au train, accompagnés de photos et d’illustrations. Pourquoi le train ? Comme elle le dit dans sa préface, il constitue « une grande métaphore de la vie » et, plus encore, peut-être, « une expérience du regard en mouvement ». Du voyage immobile, donc, par le rêve et l’imaginaire. Ce qui nous renvoie à la littérature.

     

    Détesté (Alfred de Vigny ­— « La science / Trace autour de la terre un chemin triste et droit ») ; célébré (Whitman, Marinetti) ; associé aux aventures de la mémoire, à l’érotisme latent des itinéraires nocturnes, à la succession vertigineuse des paysages, le moyen de transport qui, plus qu’aucun autre, a été l’image même de la modernité apparaît ici dans tous ses états. Et à Verlaine, Cendrars, Proust ou bien d’autres, Anne Reverseau mêle des voix contemporaines. Laissons, cependant, je ne peux m’en empêcher, le dernier mot à Huysmans : « Est-ce qu’il existe, ici bas, un être conçu dans les joies d’une fornication et sorti des douleurs d’une matrice dont le modèle, dont le type soit plus éblouissant, plus splendide que celui de ces deux locomotives adoptées sur la ligne du chemin de fer du Nord ? »

     

     

    Le Japon pittoresque, Maurice Dubard (Mercure de France, collection « Le kitsuke.e-monsite.comTemps retrouvé »)

     

    Dubard était officier de marine. En ces années 1870, qui voient le Japon, récemment ouvert à l’Occident, se rapprocher de la France et faire appel à elle dans les domaines technique ou juridique, il effectue un long voyage dans le pays, d’où il rapporte un récit qui, comme l’indique son titre, ne donne pas dans l’érudition. Lieux, coutumes, paysages, scènes vécues et croquées, voilà son livre. Avec de fréquents développements sur un sujet censé intéresser spécialement le lecteur français : les Japonaises. « Sans être absolument jolies, suivant les lois de la plastique, elles sont ce que l’on peut appeler agaçantes : douces, rieuses, mignardes et surtout pas gênantes, elles réunissent par excellence toutes les qualités de la maîtresse modèle. Aussi n’est-il guère d’Européen, établi dans le pays, qui ne soit pourvu de ce meuble de luxe ».

     

    La quête d’un tel « meuble » par Marcel, le compagnon de voyage du narrateur, va déclencher bien des péripéties, et faire basculer ce curieux récit documentaire dans le registre du roman sentimental à la Loti. Il est précédé d’une savante et éclairante introduction par Philippe Artières.

     

    P. A.

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